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Dossiers météo-climato-photo


    1] le climat de 1600 à 1633 en Moselle Alsace


Le climat de 1600 à 1633 en Alsace-Moselle

Le début du XVIIe siècle

 

De 1600 à 1617 : une série d’années marquées en général par de bonnes vendanges, après des hivers plutôt froids et des étés plutôt chauds

L’année 1600 commence par un hiver froid qui dure jusqu’en mars…… et les températures vont rester, dans l’ensemble,  sous les normes pendant une longue période, quasiment jusque vers 1700 ; les étés restent souvent frais et pluvieux, ce qui nuit aux moissons et aux récoltes ; le prix des céréales flambe pour quelques années au début du siècle et les investisseurs mettent de  plus en plus la main sur la production céréalière porteuse de bons profits : ceci représente  globalement 20% de l’ensemble des investissements ! Ce renchérissement n’apporte pourtant aucune amélioration à la production minée le plus souvent par le mauvais temps.

En 1601, année à peu près normale, seul un tremblement de terre a défrayé la chronique ; il a secoué l’Alsace durant la nuit du 7 au 8 août mais, fort heureusement, il fut sans réelle gravité.

En 1603 l’hiver est très froid et les rivières sont prises dans les glaces ; le reste de l’année est plutôt chaud et agréable : les récoltes sont favorables et les vendanges sont bonnes grâce à un bon ensoleillement ;  les bons résultats agricoles profitent bien à la ville de Strasbourg où s’est développée une industrie des eaux de vie et des vinaigres ; cette industrie est florissante en 1605 mais la production va, peu après, commencer à décliner progressivement avec des aléas climatiques de plus en plus risqués.

En 1607 l’hiver est extrêmement froid avec les cours d’eau gelés, principalement en février ; ce froid vif provoque de nombreux décès et beaucoup d’animaux domestiques ou sauvages succombent également aux morsures du froid vif. En fin d’année, le 18 décembre, un vague de froid s’amorce déjà, signe précurseur d’un hiver 1608 très rude qui va durer jusqu’à la mi-mars ; le Rhin même est pris dans les glaces ! Après l’hiver, lors d’une grande crue, le Rhin ravage la plaine d’Alsace et certains villages, comme Offendorf, se retrouvent complètement isolés. Le 22 décembre 1608 a lieu une nouvelle offensive du froid et l’hiver 1609 est encore plus rude que les précédents avec beaucoup de neige : il fait  froid jusqu’à la fin du mois de mars ! Cette fois-ci les moissons sont compromises et le prix des céréales est en forte hausse ; le grain est de plus en plus cher et cela va durer jusque vers 1612, les spéculateurs en profitent bien entendu ! Par ailleurs, l’ensemble des prix  progresse nettement et c’est le cuivre qui, momentanément, devient le métal le plus prisé pour la frappe de la monnaie. Il faut également noter une nouvelle épidémie de peste qui dure jusqu’en 1610 avec une mortalité importante notamment à Molsheim et à Strasbourg où l’on compte 2000 décès en 3 mois. La petite ville de Hunawihr est également durement touchée par ce fléau en 1610.

L’été est très sec et chaud en 1612 ; des incendies de forêts se déclarent en maints endroits : le 6 septembre un immense brasier détruit le village Grendelbruch situé en plein massif boisé ; la ville de Molsheim organise les secours et approvisionne, notamment en blé, les villageois rescapés qui ont tout à reconstruire. La crise monétaire s’accentue encore comme à travers toute l’Europe, les fausses monnaies circulent de même que les pièces rognées (pour arracher quelques milligrammes de métal précieux) ; les valeurs nominales sont en hausse jusqu’en 1613. La ville de Strasbourg, lassée de perdre de l’argent, décide de fermer son bureau de change le 1er août 1612 et la ville de Colmar fait de même peu après.

Contraste avec les années précédentes, l’hiver 1614 est spécialement doux et l’été chaud favorise de bonnes vendanges. En 1615 c’est un orage qui a retenu l’attention des chroniqueurs : en effet une violente tempête frappe la région de Metz avec d’énormes grêlons qui commettent des dégâts importants aux toitures parfois entièrement détruites ; des cochons restés au champ ont été tués par ces projectiles glacés impressionnants.

L’année 1616 est très froide du 1er au 31 janvier et ce temps glacial fige de nouveau les cours d’eau. En 1617 se produit une grande sècheresse qui nuit aux récoltes ; celles-ci sont pauvres et menacées par  les campagnols qui finissent par pulluler. Le 22 juillet la foudre touche la cathédrale de Strasbourg : elle traverse  l’édifice et terrifie l’assemblée des fidèles, mais plus de frayeur que de mal.

De 1618 à 1633 : généralisation des années à printemps et étés frais et pluvieux, avec des vendanges tardives.

L’année 1618 commence par un hiver doux et humide : mais l’évènement majeur c’est la Guerre de 30 ans qui éclate dans l’Empire et les troupes qui se battent, soit pour le souverain catholique, soit pour les princes protestants, ne se gênent pas pour piller à leur guise ou pour pratiquer la politique de la terre brûlée, ce qui n’arrange en rien les difficultés d’approvisionnement des villes déjà accentuée par un temps frais et pluvieux défavorable à l’agriculture. Ajoutez à cela les épidémies allègrement transmises par les troupes de mercenaires et vous devinez le cocktail terrifiant qui va ruiner notre région pendant plus de trois décennies !

Mais en 1618, la guerre n’est pas encore à nos portes ; cependant la hausse générale des prix prend une allure galopante, et ceci jusque vers 1639 ! Le printemps et l’été 1618 sont frais, voire froids, et pluvieux, les vendanges tardives sont mauvaises ; en Alsace, pour  diversifier les productions agricoles, on procède aux premiers essais de plantation du tabac à Bischwiller et à Hanhoffen, production à forte plus-value qui va peu à peu s’étendre pour satisfaire principalement aux besoins des troupes.

En 1620 une comète à deux queues croisées, phénomène très rare, apparaît dans le ciel de l’Alsace – Moselle et passe pour un très mauvais présage : en effet la guerre finit par se porter sur notre région avec son lot de malheurs et de misère.

De fin janvier à fin février 1621 un froid intense règne et solidifie les cours d’eau. A cause de la guerre et du dérèglement économique qu’elle entraîne, plus que par le mauvais temps généralisé, l’altération des monnaies est catastrophique et freine les échanges commerciaux et l’approvisionnement ; le cuivre devient alors, bizarrement, le métal le plus coté devant l’or et l’argent !

En 1622 : même temps pourri ! Un nombre important d’épidémies est disséminé par les mouvements de population : les troupes de mercenaires et les flots de réfugiés ; la peste refait son apparition dans le nord de l’Alsace en frappant durement Bouxwiller et La Petite Pierre ; se rajoutent à ce fléau, au moins jusqu’en 1624, le choléra, le typhus et la dysenterie.

L’hiver 1623 est rude avec les rivières gelées puis, fin décembre, une nouvelle vague de froid déferle sur la région où la disette et les épidémies font plus de ravages que les faits de guerre. La peste frappe aussi la Lorraine où les victimes ne sont plus à compter. Le grand froid dure jusqu’au 3 janvier 1624 puis une autre vague de froid aussi intense s’installe pour 8 jours courant février ; le reste de l’année reste très frais et pluvieux. En 1625 la situation des vignerons devient si précaire qu’ils finissent par se révolter contre les négociants strasbourgeois qu’ils qualifient de trafiquants…… des pamphlets et des caricatures circulent et le ton monte : producteurs ne pouvant plus vivre décemment du revenu de leur travail contre distributeurs et spéculateurs !

En 1626 de nouvelles épidémies, dont celle de la peste, frappent plus particulièrement Phalsbourg, Saverne, Bouxwiller et Wangen, petit village viticole où l’on déplore 200 décès ! La chasse aux sorcières est toujours d’actualité  dans un obscurantisme le plus total, tant du côté protestant que du côté catholique : 27 sorcières sont brûlées à Haguenau en 1627, autant à Molsheim ! Cela n’empêche pas la peste de continuer ses ravages en 1628 : elle frappe également le Haut-Rhin jusqu’ici à peu près préservé : la ville de Masevaux est très atteinte, la mortalité est grande dans le Sundgau. C’est que les conditions climatiques restent toujours très défavorables : les récoltes sont mauvaises et les denrées de première nécessité doivent être achetées hors d’Alsace pour limiter les méfaits de la famine ; les vendanges sont désastreuses et la misère des vignerons s’accentue. A cause de la pénurie alimentaire la ville de Rosheim est même obligée d’emprunter de l’argent à un nobliau, Samson de Landsberg, pour l’achat de vivres ; Rosheim décide aussi, à cause d’une nouvelle montée de l’antisémitisme, d’expulser la population juive établie dans l’enceinte de la ville.

L’hiver 1629 est froid et la neige tombe en quantité. La soldatesque  importe en Alsace la peste dite « de Hongrie » ; la peste frappe durement Thann, Rouffach, Colmar, Sélestat, Strasbourg, Haguenau et le Ried du Nord autour de Gambsheim et Offendorf ainsi que la région de La Petite Pierre. En 1630 la disette reste d’actualité d’autant plus qu’il a fait froid jusqu’en juillet qui reste frais et pluvieux ; malgré un mois d’août qui connaît un temps estival dans les normes, les récoltes sont misérables ; le vignoble n’est pas épargné : les villes de Riquewihr et de Ribeauvillé interdisent désormais les cépages communs fragiles et peu rentables au profit de vins de qualité afin de faire face à la crise viticole. Les récoltes vont rester insuffisantes pour une bonne dizaine d’années avec un état de famine permanent.

Dès 1630 la peste se propage en Lorraine, laissant très peu de répit à l’Alsace  qui, dès 1631, voit le retour de ce fléau qui s’en prend aux Alsaciens à peine remis des épidémies précédentes. L’hiver 1631, très froid, n’arrange rien : la ville de Strasbourg interdit désormais, par ordonnance, toute forme de mendicité et organise des chantiers municipaux pour faire travailler ses pauvres…. le travail ne manque pas, les travaux de réfection et de construction des fortifications ont besoin de main d’œuvre. La chasse aux sorcières continue et concerne même les villages, comme Schnersheim par exemple.

Les vendanges 1631 sont de nouveau si mauvaises que la crise viticole atteint un point critique : la misère des vignerons s’aggrave à tel point  que de nombreux villages viticoles finissent par être abandonnés au moins provisoirement. En fin d’année la reine de France, qui se rend en visite dans la bonne ville de Metz , y est surprise par une importante crue, le 24 décembre, ce qui finit  par gâcher cet évènement important.

La guerre reprend de plus belle en 1632 avec l’invasion de l’Alsace par les troupes (protestantes) suédoises du roi Gustave-Adolphe. Les soldats traînent dans leurs basques une nouvelle épidémie de peste qui prend une grande ampleur en 1633 : à Strasbourg le fléau touche en premier lieu le quartier du Marais Vert où sont regroupés les paysans réfugiés fuyant devant la progression des troupes.

 


  par beck
 
    2] le climat en Moselle Alsace de 1634 à 1650


Le climat de 1634 à 1650 en Alsace-Moselle

Le milieu du XVIIe siècle

 

de 1634 à 1639 :  une série d'années de plus en plus chaudes avec des étés brûlants et des vendanges précoces

1634 est une très bonne année agricole grâce à un temps clément; les vendanges sont précoces après un été beau, chaud et sec. Des orages qui éclatent durant la belle saison sont suivis de 3 jours de pluies torrentielles, surtout en Lorraine et sur les Vosges; ces pluies gonflent les cours d'eau et la Moselle finit par déborder ! L'épidémie de peste persiste et frappe plus durement le Haut-Rhin : le village de Blotzheim compte 200 décès causés par la maladie.

Début 1635 les rivières se retrouvent prises dans les glaces et, le 8 janvier, se produit une brusque débâcle lors d'un redoux important; l'accumulation de blocs de glace est telle qu'elle provoque des inondations et c'est la Moselle qui est de nouveau la plus touchée. A la mi-février, des pluies arrosent copieusement la région et de nouvelles crues sont à déplorer sur l'ensemble de nos contrées. L'été est particulièrement chaud et les températures  très élevées favorisent la propagation de la dysenterie qui fait beaucoup de victimes. Les épidémies sont toutes en progression et la famine reste d'actualité car les récoltes  sont insuffisantes. La peste fait des ravages dans la bonne ville de Riquewihr qui vient d'être occupée par les troupes lorraines, on y compte 30 décès par jour en moyenne. La ville de Munster est également très touchée par le fléau ainsi que Ferrette dans le Jura alsacien et Belfort; dans le nord de la région, il en est de même à Bouxwiller, La Petite Pierre et Sarre-Union. Epidémies et famine vont persister pendant 4 longues années.

L'année 1636 est celle de la grande sècheresse sous un soleil d'été brûlant; c'est une véritable catastrophe pour l'agriculture et la famine est totale. Strasbourg procède à une nouvelle expulsion des mendiants affamés alors que l'on note par endroit des actes de cannibalisme perpétrés par de pauvres bougres qui n'ont plus que cet infâme recours pour ne pas mourir de faim. De plus, la peste fait une hécatombe; c'est l'année la plus terrible de l'épidémie; encore une fois, c'est le sud de la région et le Territoire de Belfort qui sont le plus touchés. Et comme un malheur n'arrive jamais seul, un nouveau tremblement de terre secoue l'Alsace et plus spécifiquement la région de Sélestat où l'on recense des dégâts matériels.

L'année 1637 n'est guère meilleure que la précédente, le temps reste sec et chaud; les résultats agricoles sont tout aussi catastrophiques et la famine perdure. Pour le vignoble c'est encore pire qu'en 1636 car on n'obtient que très peu de vin avec des grappes qui partout se dessèchent  au soleil ardent. La famine prend de telles proportions que les actes de cannibalismes se multiplient : des miséreux se mettent à dépecer des cadavres humains et même des corps de petits enfants, que les mères ne peuvent plus nourrir, pour arriver à survivre. La population frappée par la guerre, la faim et les maladies ne représente parfois plus que quelques individus dans des villages qui finissent par être abandonnés, certains pour toujours, d'autres seulement momentanément ! Le mouvement d'émigration, qui s'est amorcé au début de la guerre de 30 ans, (par exemple dans l'Alsace Bossue ... mais pas seulement) s'accélère rapidement en direction des Pays-Bas ou de la Suisse, contrées moins sinistrées que notre région. Ceci d'autant plus que les routes commerciales, qui passent par l'Alsace et la Moselle, cessent pratiquement d'être empruntées à cause de l'insécurité qui règne et de la famine qui rend tout ravitaillement en vivres impossible. La flambée des prix est à son apogée !

En 1637 apparaissent aussi d'autres fléaux comme  l'invasion de rats dont les puces qu'ils transportent sont le vecteur de la peste qui s'aggrave donc encore jusqu'en 1638; mais il y a aussi les poux et les puces de l'homme qui, par myriades, infestent les habitations et se repaissent de leurs habitants.

L'année 1638 est  marquée par un isolement désormais total de notre région, entièrement coupée du monde au niveau du commerce interrégional et international pour les mêmes raisons que l'année précédente. C'est que la guerre et la famine se prolongent. Un ressortissant anglais s'adresse à la ville de Strasbourg à laquelle il apporte une solution pour lutter contre la faim : il propose en effet de planter  une céréale tout droit venue d'Amérique : il s'agit du maïs !

Le dernier été de cette série, celui de 1639, reste très chaud et sec et les conditions de vie ne s'arrangent guère en Moselle et en Alsace.

De1640 à 1643 : une période d'années froides : des printemps et des étés en général frais et pluvieux avec des vendanges tardives

L'année 1640 est marquée par l'éloignement des zones de combat qui se déroulent désormais hors de la région, et l'Alsace, enfin, peut reprendre son souffle; mais les gens continuent de souffrir d'une année froide, d'une été frais et pluvieux qui contraste nettement avec les étés brûlants des 6 années précédentes. Lors d'un orage qui s'abat sur Strasbourg, la foudre atteint la cathédrale et endommage sa célèbre Horloge Astronomique. La fin de l'année est encore plus froide et, dès octobre, on connaît déjà de bonnes gelées.

C'est que l'hiver 1641 et froid et très long : il ne prend fin qu'au mois de mai; de plus, des crues du Rhin ravagent de nouveau la plaine d'Alsace. Cependant le trafic commercial est progressivement réamorcé, ce sont les prémices d'une relance économique mais aussi le début d'une baisse générale des prix, d'autant plus que les récoltes de 1641 sont correctes.

En 1642 l'hiver est doux et pluvieux mais il est suivi d'un été pourri ! Cette fois-ci les récoltes sont mauvaises et insuffisantes, c'est de nouveau la famine dans toute la région.

L'année 1643 est du même acabit en commençant également par un hiver doux et très humide.

De 1644 à 1647 : poursuite des années à vendanges irrégulières avec des coups de froid et des coups de chaleur

L'hiver 1644 contraste avec les 2 précédents car il est très froid et les cours d'eau sont de nouveau gelés. Le 24 avril, une grande comète s'abat sur la Lorraine, terrifiant la population : c'est un mauvais présage ! Et comme pour donner crédit à la superstition une terrible vague de froid touche notre région entre le 28 avril et le 13 mai ; la neige tient souvent au sol, notamment en Lorraine où l'on mesure une couche de neige allant jusqu'à 30 cm; une croûte de verglas de 2 cm d'épaisseur se forme même  le 2 mai. Après cet épisode qui grève déjà les espoirs agricoles, de fortes chaleurs apparaissent dès juin : des ouvriers agricoles meurent dans les champs sous un soleil de plomb ;  on finit par ne travailler que tôt le matin et dans la soirée pour éviter l'insolation mortelle !

L'année 1645 est plutôt une heureuse surprise car elle est belle et chaude; les viticulteurs en profitent et se frottent les mains car le vin de cette année est très bon.  Mais l'hiver 1645 a aussi eu son lot de tempêtes : en janvier l'une d'elles s'est acharnée sur Brisach où presque toutes les maisons sont endommagées, les toitures arrachées. Non loin de nos frontières, la ville de Granges en Franche Comté est détruite par un ouragan, même son château, réputé solide, n'a pas  pu résister à la violence du vent.

L'année 1646 est caractérisée par de fortes chaleurs en été et par une sècheresse  durable; beaucoup de paysans sont frappés d'insolation dans les champs comme l’année précédente. Le raisin et les fruits dessèchent au soleil, les récoltes comme les vendanges sont donc pauvres cette année-ci et ne réussissent pas à nourrir la population.

De 1647 à 1650 : des années froides à été frais et pluvieux et à vendanges tardives

L'hiver 1647 est marqué par de violentes tempêtes au mois de février; l'année reste très fraîche et très humide avec, à la clef, de mauvaises récoltes; des épizooties se déclarent et ruinent le bétail affaibli par le manque de fourrage.

En 1648 les calamités de la guerre prennent fin  avec la signature des Traités de Westphalie; le bilan de 30 années de guerre laisse perplexe : sans prendre en compte les destructions effectuées par les troupes impériales, suédoises ou françaises, la région sort exsangue de ce conflit : en effet les épidémies et la famine, due au mauvais temps mais aussi aux faits de guerre, ont fait plus de ravages que le feu et l'épée ! Il ne reste plus que 250.000 habitants en Alsace, soit 1/3 de la population d’avant-guerre ; il n'y a plus que 10% de la traction animale disponible dans la région; pour labourer, transporter, ravitailler, c'est quasiment impossible à réaliser dans ces conditions précaires. 1648 est une année de soulagement pour les villes et les négociants, beaucoup moins pour les paysans et les vignerons car la campagne manque de bras. Dès la fin des vendanges, 1648 le froid s'engouffre déjà sur notre région.

L'hiver 1649 est très froid et long mais avec des crues lors de redoux en février ! Le froid va persister jusqu'à la mi-mai et les champs, minés par le gel qui a détruit une partie des semences, ne sont pas encore verts à la fin mai ! Les ¾ du blé sont perdus, brûlés par le froid et, comme l'été est frais et pluvieux, les récoltes sont très mauvaises; la montée du prix du blé est effarante et elle va se prolonger jusqu'en 1651. Une nouvelle épidémie de peste concerne également l'Alsace.

En 1650, à cause d'une nouvelle épidémie de rage, on organise, principalement dans le Haut-Rhin, des battues pour chasser les loups qui, lorsqu'ils sont contaminés par le virus destructeur, s'en prennent à l'homme: le 5 octobre une de ces bêtes furieuses attaque les porchers d'Ottmarsheim qui meurent tous de leurs morsures. Un grand loup féroce est tué près de Bantzenheim.

C'est dans ce contexte qu'arrivent dans notre région les premiers colons étrangers attirés par les autorités qui veulent repeupler d'urgence la campagne car on manque cruellement de main d'oeuvre pour mettre les friches en valeur; un grand mouvement d'immigration « choisie » s'amorce et va durer jusque vers 1665. Des édits de défrichements permettent également de nouvelles installations dans des lieux jusqu'ici inhabités.

 


  par beck
 
    3] Moselle-Alsace: le climat de 1651 à 1686


Le climat de 1651 à 1686 en Alsace-Moselle

 

                                            La deuxième moitié du XVIIe siècle

 

de 1651à 1663 :  une série d'années à hiver en général froid avec des périodes d'inondations

Alors qu'en 1651 se poursuit l'importante épidémie de rage, qui terrifie la population proche des zones boisées, et les traques aux loups organisées pour anticiper les attaques des bêtes rendues furieuses.... l'hiver est très humide; le 6 janvier une grande inondation du Rhin noie une partie de la plaine d'Alsace en sinistrant de nombreux villages riverains comme Gambsheim et Offendorf. L'été 1651 est beau et chaud mais également sec. 1652 l’est encore davantage car c’est l'année de la grande sècheresse ; dès le printemps qui est surchauffé et durant l'été qui est brûlant en Moselle – Alsace, il ne tombe quasiment pas de pluie. Mais au mois d'août, après de terribles orages et des pluies torrentielles, le Rhin sort subitement de ses lits et arrache des digues, causant des dégâts très importants; à Brisach, une partie des  remparts et des maisons est emportée ; les prévôts des villages de Herrlisheim (Bas-Rhin), Rohrwiller, Offendorf et Oberhoffen s'empressent de rétablir dare-dare les digues et de renforcer les plus fragilisées; mais les espoirs de récoltes sont  anéantis dans tous les villages environnants comme Gambsheim. Ailleurs les récoltes sont maigres et amplifient la misère.En 1654 les crues font de nouveau des ravages et un pan de montagne finit même par s'effondrer près de Raon-l'Etape ; un trou béant se forme et le 13 juillet l'eau s'infiltre partout pour inonder finalement la petite ville.

1655 est une année presque sans histoire si ce n'est l'arrivée brutale d'un hiver rude et long à partir du 25 novembre. C'est que l'hiver 1656 est « carabiné » avec les cours d'eau qui gèlent partout. 1657 suit exactement le même schéma que 1655 avec le retour d'un hiver glacial dès décembre. Et, en effet, l'hiver 1658 est tout aussi rigoureux jusqu' au début du mois de février : on peut même traverser à pied sec le Rhin pris dans les glaces. Dès mars 1658 le temps pluvieux provoque de nouvelles inondations qui sont  heureusement suivies d'un temps chaud et ensoleillé, ce qui sauve les récoltes et les vendanges. Dès le  9 novembre de cette année-là, le froid s'engouffre sur la région pour nous « mitonner » un hiver 1659 froid et très neigeux. Et comme pour rester dans la continuité, en décembre 1659, une grande vague de froid cloître la population dans les maisons : janvier et février 1660 sont également rudes, les rivières gèlent de nouveau et, cette année-ci, les récoltes sont spécialement médiocres; de plus, une nouvelle épidémie de rage sévit, mettant en danger les habitants des zones forestières.

L'année 1661 est marquée par l'arrivée massive de colons étrangers  attirés par les autorités pour accélérer le repeuplement de la région car on manque toujours d'effectifs pour restaurer les capacités de l'Alsace à faire face aux besoins agricoles; le maximum de cette immigration sera atteint entre 1665 et 1669. Ce sont de loin les Suisses, rudes paysans habitués au climat montagnard, chassés de chez eux après la dure répression des jacqueries, qui représentent entre 50 et 70% de ceux qui s'installent dans nos campagnes désertées durant la guerre de 30 ans. La météo de 1661 ne leur réserve qu'un temps en général maussade, avec un printemps et un été pluvieux, de mars à août ! Déjà s'amorce une famine consécutive aux mauvaises récoltes à répétition de ces dernières années, la plupart des stocks s'épuisant. En décembre 1661, c'est le « bouquet » ! Car c'est durant ce mois que les pluies sont de loin les plus abondantes.

Une nouvelle hausse des prix, non durables cette fois-ci, grève les budgets, surtout à partir de 1662. Janvier et février 1662 sont dans la continuité avec un temps restant pluvieux, l'été ne sera guère meilleur; les récoltes restent mauvaises, ce qui aggrave la situation d'insuffisance alimentaire. Subitement, le 5 décembre 1662, une vague de froid fait irruption dans la région et les cours d'eau gèlent rapidement. L'hiver 1663 est effectivement froid et neigeux, principalement en février; de grandes crues du Rhin ravagent aussi la plaine d'Alsace mais, fort heureusement, les récoltes sont correctes et l'état de famine commence à se résorber.

De1664 à 1671 : une période d'années à hivers en général froids avec des étés chauds

1664 et 1665 sont des années plus clémentes et favorables aux récoltes et aux vendanges avec de beaux étés; notre région retrouve un équilibre alimentaire et les stocks sont reconstitués. L'année 1666 est caractérisée par un été très, très chaud : les vendanges sont précoces et les récoltes toujours bonnes. C'est peut-être à cause des fortes chaleurs qu'une nouvelle épidémie de peste touche les villes du Rhin et commence par concerner l'Alsace en frappant gravement la ville de Lauterbourg. La population alsacienne et mosellane vit dans la terreur de ce fléau qui a, par le passé, décimé  des familles entières; c'est le cas des Strasbourgeois qui prennent enfin des mesures draconiennes d'hygiène en organisant un balayage quotidien des rues et le ramassage des ordures chaque jour; ces mesures vont limiter le pullulement des rats dont les poux qu'ils transportent sont le vecteur de la maladie ; grâce à ces mesures, la ville de Strasbourg sera totalement épargnée.

La peste se propage cependant dans toute l'Alsace, du nord au sud, en 1667, année qui commence par un hiver froid avec son lot de cours d'eau figés dans les glaces ; le fléau frappe durement la région de Colmar, de Guémar à Ostheim, et Strasbourg résiste en continuant d'appliquer les mesures d'hygiène qui se montrent d'autant plus efficaces que la ville contrôle aussi l'état sanitaire des étrangers qui veulent pénétrer derrière ses remparts; ceux-ci doivent être munis d'une carte sanitaire prouvant qu'ils sont indemnes de cette terrible maladie. L'été 1667, beau et très chaud,  contribue à l'extension du fléau et la sècheresse qui règne provoque aussi des incendies de forêts ; le plus important est celui des forêts de Lichtenberg qui sont la proie des flammes et menacent la petite ville dont les habitants courageux luttent 3 jours durant contre le feu avec des moyens dérisoires.

En 1668 la peste fait une hécatombe dans certaines localités alsaciennes, notamment à Guémar mais aussi à Ribeauvillé qui est encore plus durement touché jusqu'en 1669. L'Intendant d'Alsace, représentant du Roi avec autorité sur la région, Colbert de Croissy (parent du célèbre ministre Colbert ), décide de mettre ces deux villes en quarantaine pour éviter d'autres contaminations...... et la mesure est efficace ! Non loin de là, la ville suisse de Bâle qui n'a pas pris de mesures à temps, subit de plein fouet le fléau. Petit à petit la peste semble se circonscrire. Si l'hiver 1669 est très rude alors qu'on peut de nouveau traverser le Rhin à pied sec sur la glace, l'été de cette année-là est par contre très chaud avec une nouvelle sècheresse qui dure de juillet à septembre.

En 1670, janvier et février sont de nouveau très froids avec les cours d'eau gelés; la rage refait une apparition brutale en Lorraine et en Alsace Bossue. A Sélestat, alors que les temps d'obscurantisme et de superstition semblaient révolus, on reprend la chasse aux sorcières, résultat : 60 exécutions!

De 1672 à 1675 : période d'années vraiment fraîches

Si l'année 1672 n'est pas marquée par des évènements climatiques remarquables à part un rafraîchissement qui s'amorce, il n'en est pas de même pour 1673 qui connaît d'abord un hiver froid avec les cours d'eau qui se figent de nouveau rapidement sous l'effet d'un gel intense et de longue durée. La différence vient de l'été qui se montre vraiment « pourri » : en juillet ont lieu de grandes inondations du Rhin et de nombreux villages sont sous les eaux comme Gambsheim et Offendorf qui sont, parmi les localités riveraines, celles qui souffrent le plus depuis des années; l'année reste fraîche et pluvieuse et les inondations sont fréquentes dans toute la région; de plus, à cause de la guerre qui oppose  la France à l'Empire, le ravitaillement est rendu difficile et hasardeux alors que les mauvaises récoltes ne parviennent plus à nourrir la population. La montée des prix qui accompagne ce genre de situation est brutale.

Si l'année 1674 est un peu meilleure, 1675 est une année plus fraîche encore, caractérisée par un temps de type océanique, en continu, avec un été carrément froid par moment de juin jusqu'à l'automne. Les vendanges sont bien sûr tardives et mauvaises, tout comme les récoltes.

De 1677 à 1686 : des poussées chaudes avec des périodes de sècheresse

Dès le 9 décembre 1676 le froid glacial s'installe en Moselle – Alsace avec des cours d'eau gelés; mais brusquement, le 13 janvier 1677, la vague de froid prend fin et c'est le dégel brutal! Le printemps est bon, l'été est chaud avec des récoltes très correctes. Le point culminant de la hausse des prix amorcée depuis 1673 est atteint avant que ne commence une baisse tant attendue, en partie grâce aux bons résultats agricoles.

Les années 1678 et 1679 sont de belles années avec des étés chauds et secs, aux belles moissons, aux récoltes et aux vendanges précoces; la pénurie alimentaire est entièrement résorbée mais ........l'ombre de la peste plane encore sur la région. En 1680 des prières publiques sont dites un peu partout pour obtenir l'éloignement du fléau; à Strasbourg, où l'on a compris l'importance primordiale des mesures d'hygiène, il est désormais strictement interdit de jeter les ordures par les fenêtres, une mauvaise habitude qui se pratiquait depuis toujours !

Les années qui suivent sont de plus en plus chaudes jusqu'en 1686 alors qu'on vient d'atteindre l'optimum de la poussée glaciaire dans les Alpes; moins de neige et une température moyenne plus élevée, cela commence à faire son effet en stoppant l'alimentation des mers de glace.

En 1681, année du rattachement de la ville de Strasbourg à la couronne de France, l'été est rayonnant et si l'agriculture ne produit pas encore autant qu’avant 1618, c'est qu'elle manque toujours de bras mais aussi, et surtout, de moyens de traction animale; le cheptel des chevaux reste dérisoire depuis la fin de la guerre de 30 ans et cette situation perdure. 1682 est de nouveau une très belle année marquée cependant par un terrible tremblement de terre dans les Vosges qui détruit en partie la petite ville de Remiremont et les villages environnants.

De beaux étés égaient les années 1683 et 1684, idem en 1685 où l'on note le pullulement des campagnols qui mettent parfois à mal les stocks; une nouvelle hausse des prix se remarque, elle va s'accentuer progressivement jusqu'en 1715 avec des variations à la hausse ou à la baisse parfois brutales en fonctions des résultats agricoles mais aussi des faits de guerre, même si ceux-ci ne concernent pas directement notre région.

Enfin, pour terminer cette période, l'été 1686, comme dans le reste de l'Europe, est l'un des plus chauds du siècle mais aussi l'un des plus secs; heureusement que les nuées de sauterelles, qui s'aventurent vers le nord de l'Europe et s'abattent sur la vallée du Rhône où elles dévorent tout ce qui pousse dans les champs et les vignes, épargnent notre région.

 


  par beck
 
    4] le climat en Moselle-Alsace de 1687 à 1718


Le climat de 1687 à 1718 en Alsace-Moselle

Le passage du XVII au XVIII e siècle

 

De 1687 à 1690 : série de printemps et d’étés humides sans réelle pénurie

On associe plus généralement cette période à celle qui s’étend jusqu’en 1703 et dont le caractère majoritaire est la répétition des printemps froids, des étés frais et pluvieux avec, en corollaire, de mauvaises récoltes et des vendanges tardives. Les productions agricoles incertaines provoquent des variations parfois brutales des prix en fonction des résultats.

Ainsi, 1687 et 1688, années plutôt dans les normes sans grands écarts, connaissent des récoltes correctes : on constate une baisse tout à fait provisoire des prix qui atteignent, selon le produit, le tiers de ceux de 1676.

L’année 1689 est marquée par un mois de janvier très froid mais le reste de l’année n’est pas si catastrophique ; en tout cas moins que l’année 1690 caractérisée par une grande pluviosité et de nombreuses inondations. Les récoltes sont mauvaises et les exportations de grains sont fortement ralenties et bientôt strictement interdites par les autorités ; en effet, la culture du blé, excédentaire depuis quelques années, est en nette régression dans cette période.

De 1691 à 1699 : une suite d’années froides suite à une baisse d’activité solaire

L’année 1691 est surtout marquée par l’entrée en scène fracassante, le 13 décembre, d’un hiver qui se montre tout de suite très rigoureux. Le gel intense dure jusqu’au 22 février 1692 ; cette année-là est, dans l’ensemble, fort froide car l’été reste toujours frais : le rendement du blé est vraiment pauvre. Dès le 10 octobre il neige déjà alors que le raisin n’est pas encore à maturité ; les vendanges très tardives se font en partie sous la neige, localement même en novembre. Tout le mois d’octobre reste glacial, il neige d’ailleurs même à Paris cette année-là ; les semailles sont totalement ratées.

L’hiver 1693 est très long puis, du printemps à l’automne, le temps reste frais et humide, juste entrecoupé d’une brève canicule aux alentours du 15 août. Mais les récoltes sont catastrophiques et débouchent inévitablement sur une disette de type médiéval suite aux mauvaises récoltes à répétition. Les pluies fréquentes et les premières gelées provoquent de nouvelles semailles ratées comme l’année précédente ; décembre est déjà très froid. L’hiver 1694 copie les précédents avec des gelées intenses et durables ; la famine s’aggrave d’autant plus que les récoltes restent médiocres. Octobre est de nouveau quasiment hivernal.

L’hiver 1695 est très froid et dure jusqu’en mars mais le temps finit par s’améliorer au printemps et l’été retrouve ses couleurs : il est même exceptionnellement chaud avec, par moment, des pluies torrentielles de type tropical. Bonne nouvelle : les récoltes sont tout à fait correctes. Mais changement de programme pour l’hiver 1696 qui est très doux ! Par contre l'hiver 1697 ressemble aux autres hivers rigoureux ; il est vraiment glacial et les rivières sont totalement gelées. 1698 est de nouveau une année froide avec un été et un automne « pourris » ; les récoltes sont mauvaises, les fruits rares et les vendanges tardives.

Derechef en 1699,  où l’hiver est très froid avec les cours d’eau pris dans les glaces. De grandes crues du Rhin aggravent  la situation agricole médiocre et une nouvelle crise du blé a lieu, avec une flambée des cours des céréales.

De 1700 à 1708 : série d’années à étés chauds avec souvent des hivers froids et des gelées tardives

Le nouveau siècle commence plutôt bien après une année 1700 qui connaît des récoltes et des moissons abondantes, pour un total de 450.000 hl de blé, un record pour l’époque. De bonnes années se succèdent, notamment 1701. Par contre, 1702 connaît des gelées tardives au mois d’avril, ce qui provoque de gros dégâts dans le vignoble de notre région. Malgré un été chaud, les vendanges ne sont pas brillantes du tout. De plus une importante chute de grêle endommage, cette année-là, les récoltes dans les villages du Pays de Hanau, autour de Bouxwiller.

1703 reste dans les normes mais c’est en fin d’année que de violentes tempêtes traversent la Moselle et l’Alsace, causant des dégâts aux forêts et aux habitations le 26 novembre et le 8 décembre. Dès 1704 les années vont se montrer en moyenne encore plus chaudes. Après des gelées tardives qui abîment le vignoble en avril et en mai 1704, l’été est sec et torride ; des incendies de forêts se déclarent comme celui qui détruit les futaies autour de Guebwiller. Après un hiver 1705 très long, le froid fait des retours fréquents brutaux au printemps, comme celui du 27 mai où la neige tombe même en plaine d’Alsace, ce qui compromet les récoltes ; la pénurie s’installe effectivement après un été trop sec et très chaud . De nouveaux incendies de forêt s’allument dans les Vosges ; les forêts de Rimbach-Murbach partent en fumée à leur tour. De plus, en décembre, une violente tempête s’abat sur la région, faisant beaucoup de dégâts, notamment  au niveau des  toitures qui sont parfois totalement arrachées ; le château tout neuf de Wesserling ne résiste pas à la force du vent et se retrouve sérieusement endommagé par l’ouragan.

L’hiver 1706 est froid ; en janvier la neige est très abondante. Le 12 mai a lieu une éclipse de soleil qui impressionne la population qui y voit un très mauvais présage. L’été est de nouveau surchauffé et trop sec, ce qui favorise une épidémie de dysenterie qui fait beaucoup de victimes. Il y a peu de récoltes et, cette fois-ci, la disette prend une tournure plus dramatique, surtout en Basse Alsace. Les vendanges sont, par contre, très bonnes. L’année 1707 ne déroge pas aux précédentes avec un printemps et un été très chauds et secs, ce qui n’arrange pas la situation de crise alimentaire grave. En 1708 le temps rentre dans les normes avec des conditions plutôt clémentes jusqu’au mois de  décembre où une vague de froid fond sur la région.

1709 : une année catastrophique

L’hiver 1709 est épouvantable ; dans la nuit du 6 au 7 janvier le froid s’intensifie brutalement ; dès le 10 janvier les températures descendent sous les -20°C, et ceci jusqu’au 24 janvier. Ce froid sibérien se généralise d’ailleurs dans toute l’Europe puisque, même à Paris, on relève -23°C les 13 et 14 janvier. Le 15 janvier les rivières sont recouverts d’une telle croûte de glace qu’on a voulu en mesurer l’épaisseur : c’est en Lorraine que la glace atteint les 60 cm.

Beaucoup de gibier meurt de froid dans nos forêts car il fait jusqu’à -30°C dans les Vosges. Le bétail est également en partie décimé car le froid fait des ravages dans les étables et les bergeries.

Les autorités réquisitionnent  2000 paysans alsaciens  pour casser régulièrement, sous les canons ennemis, la glace du Rhin complètement gelé, afin que le fleuve ne puisse pas laisser le passage aux troupes impériales. Les vignes gèlent et même celles du Midi de la France subissent le même sort. Si les températures remontent un peu après le 24 janvier, il faut attendre le 4 février pour voir un premier signe de vrai redoux.

Mais l’hiver n’a pas dit son dernier mot, les cours d’eau restent longtemps gelés, et le froid va revenir plusieurs fois jusque tard dans la saison par une succession de gels, avec de la neige,  et de dégels ; et cela dure jusqu’en juin ! C’est ainsi qu’une épaisse couche de 40 cm de neige recouvre la ville de Marlenheim et ses abords en plein mois de juin. Ce temps hivernal qui s’éternise enlève tout espoir de bonnes récoltes cette année-là ; au contraire, la disette est dramatique, le prix du pain explose car il n’y a pas ou peu de récoltes et pas de vin du tout cette année-là. Le ravitaillement de la région est nécessaire depuis le printemps. Dès décembre 1709 le froid est de retour pour une nouvelle épreuve hivernale.

De 1710 à 1718 : années très instables avec de grands contrastes

En1710, même si l’hiver n’est pas comparable par son intensité à celui de l’année précédente, il est tout de même très froid ; les récoltes sont également mauvaises et la disette continue de miner la santé de la population. A Strasbourg les miséreux affamés finissent par piller les boulangeries. 1711 n’est pas non plus une bonne année car il y a beaucoup de neige en hiver puis des inondations lui succèdent au moment du redoux. Des pluies torrentielles prennent le relais et le mauvais temps persiste, les mauvaises récoltes également, encore aggravées par une invasion de souris qui  dévorent frénétiquement tout ce qui reste à glaner. La famine reste d’actualité.

1712 est une année un peu meilleure car l’été est chaud mais les récoltes restent médiocres alors que les vendanges, qui ont profité du soleil, sont abondantes. Le bétail, affaibli après de mauvaises années, est frappé par une importante épizootie.

1713 est de nouveau une année à problèmes : même si l’hiver n’a pas été spécialement froid, les gelées tardives durent jusqu’au mois d’avril qui se montre carrément hivernal ; les vignes gèlent sur pied ; il y a encore des températures négatives le matin au mois de juin. Puis l’été devient très chaud ; un orage de grêle s’abat sur le ban de Souffelweyersheim, y détruisant tout espoir de récolte. Dans l’ensemble de la région il n’y a que peu de fruits, les récoltes sont maigres et il faut de nouveau lutter contre les souris qui pullulent. Les vendanges sont également mauvaises. La disette persiste. De plus, une épidémie de « pourpre » frappe principalement le Haut-Rhin, notamment les villes de Soultz, de Guebwiller et de Murbach où les décès sont nombreux.

1714 est une année plus clémente et la population bénéficie d’une production agricole satisfaisante. En 1715 on remarque la reprise d’une activité solaire normale qui correspond bizarrement au décès du Roi Soleil, Louis XI; le soleil revigoré aura une influence sur le temps de notre région qui s’améliore déjà cette année-là avec de bonnes récoltes et d’abondantes vendanges ; le cours du vin s’effondre rapidement pour une durée de trois ans. Mais dès le 20 décembre, débute un nouvel hiver glacial.

En 1716 il fait très froid jusqu’au 31 janvier puis, après un redoux, le froid revient à la rescousse début mars  jusqu’au 15 avril avec beaucoup de neige. L’été connaît une grande sècheresse mais les moissons, qui ont pu être faites avant le manque d’eau, sont abondantes ; pourtant les autorités interdisent toute exportation de grains afin de constituer de nouvelles réserves en cas de récidive de la pénurie. Malheureusement pour le vignoble, un insecte ravage les ceps alsaciens et le rendement des vendanges est des plus mauvais. Dès octobre débute une vague de froid précoce mais non durable qui est suivie par des inondations et de fortes tempêtes de vent. Enfin, en 1718, les gelées tardives sont  bien marquées car il gèle encore au mois de mai, ce qui provoque de nouveaux dégâts dans le vignoble, surtout dans le Haut-Rhin.


  par beck